Éric T. de Clermont-Tonnerre, Fierté de l’espérance, édition Salvator, Paris, 2020,215 p.  pages 57-58.

Certains livres ont la simplicité de la profondeur et viennent naturellement comme livre de chevet, surtout en période de confinement. Fierté de l’espérance du frère Éric T de Clermont-Tonnerre, dominicain du couvent de l’annonciation de Paris et ancien provincial de la province de France,
nous offre par ce livre le fruit d’une expérience, nourrit aussi bien par la connaissance des Écritures que par une pratique pastorale incarnée dans les accompagnements spirituels de nombreux laïcs.

Le propos est organisé à l’aide des différentes dimensions de l’amour, telles que dépeintes par l’apôtre Paul dans la lettre aux Éphésiens ( Ep 3,14–21). Après avoir invité à développer l’homme intérieur, l’apôtre des nations affirme que vous recevrez la force de comprendre ce que sont « la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur » de l’amour du Christ dans la plénitude de Dieu. Reprenant ces dimensions, l’auteur les interprète pour leur donner une signification qui ouvre la méditation. Ainsi la hauteur est l’Amour du Père pour son Fils et pour les hommes, la profondeur est cet Amour venant de l’homme qui avec l’Esprit saint œuvre dans l’intime pour y inscrire le Christ, la largeur est l’Amour pour le frère qui devient image du visage humain défiguré et transfiguré du Christ, et enfin la longueur est cet amour qui se déploie dans le temps et s’offre jusqu’au bout.

Structuré par ces quatre dimensions, l’ouvrage se déploie pour nous faire découvrir les couleurs variées qui y sont inscrites. Chemin faisant, en compagnie de ce frère, nous parcourons « l’océan » qui nous surpasse, offert de manière surprenante et gratuite par l’Amour qui crée toute chose, en le laissant libre.

Incidemment dans un court chapitre appelé objectivité de la Foi. C’est sans doute un élément essentiel de cet ouvrage, comme il l’est de manière plus générale pour les frères et sœurs de Saint-Dominique. Le frère Éric T de Clermont-Tonnerre nous invite à redécouvrir cette objectivité de la foi, qu’il cite au titre d’un article de vie spirituelle des années 40 du frère Thomas Deman. Cette objectivité est tournée vers les vertus théologales de Foi, Espérance et Charité. Par là même, cette objectivité de la foi évite d’avoir pour centre tous les développements personnels, croissances spirituelles, guérisons psychologiques et même l’utilité de la pratique des œuvres de charité ou la recherche de la pureté. Tout cela vient par surcroît, car connaître l’homme c’est grandir dans la connaissance de Dieu. En ces temps où beaucoup d’écrivains, qui se qualifient eux-mêmes de spirituels, nous abreuvent de conseils de thérapeute pour, ici et maintenant, goûter au bonheur de Dieu et de l’équilibre, cette exigence de l’objectivité de la Foi est un rappel salutaire et un impératif collectif. L’objectivité n’exclut pas le sentiment et l’implication profonde et personnelle, mais elle vérifie, par sa nature même, la juste orientation de la vie spirituelle. C’est pourquoi elle doit être première, car elle seule nous maintient dans l’orientation vers ce que l’on nomme les fins dernières – non parce qu’elles surviendraient après, mais parce qu’elles orientent tout.

Certains livres au-delà de leur écriture demande une vie pleine et fidèle pour qu’il puisse écrit, Fierté de l’Espérance est de ceux-là.

Gilles Berrut, ancien responsable provincial